05.03.2025

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Exposition spéciale à Mayence : La plus ancienne chartreuse allemande : 700 ans de chartreuse à Mayence

Le musée épiscopal de la cathédrale et du diocèse de Mayence présente, avec son exposition spéciale sur la chartreuse de Saint-Michel-sur-le-Rhin, des témoignages d'une époque disparue. Ici, sœur Johanna dans son atelier du monastère d'Engelthal (Altenstadt/Wetterau) lors des travaux préparatoires pour l'exposition. Photo : Musée épiscopal de la cathédrale et du diocèse de Mayence

Le musée épiscopal de la cathédrale et du diocèse de Mayence présente, avec son exposition spéciale sur la chartreuse de Saint-Michel-sur-le-Rhin, des témoignages d'une époque disparue. Ici, sœur Johanna dans son atelier du monastère d'Engelthal (Altenstadt/Wetterau) lors des travaux préparatoires pour l'exposition. Photo : Musée épiscopal de la cathédrale et du diocèse de Mayence

Avec son exposition spéciale sur la chartreuse Saint-Michel sur le Rhin, le musée épiscopal de la cathédrale et du diocèse de Mayence présente des témoignages d’une époque disparue. Le monastère était devenu une destination de rêve pour les voyageurs sur le Rhin, jusqu’à ce que l’imposant bâtiment soit démoli à la fin du 18e siècle (jusqu’au 10 mars 2024).

Aujourd’hui, l’expression “changement d’époque” est toujours sur toutes les lèvres. Si l’on s’intéresse un tant soit peu à l’histoire, on a vite l’impression que presque toutes les générations ont vécu des “changements d’époque”. C’est ce que montre l’exposition spéciale actuelle du musée épiscopal de la cathédrale et du diocèse de Mayence, qui présente environ 80 pièces. À l’occasion du 700e anniversaire, “La chartreuse de Mayence” est mise à l’honneur. À travers l’histoire de cette chartreuse, la plus ancienne d’Allemagne, le visiteur est plongé dans un monde en grande partie disparu. Mais les œuvres d’art qu’elle a conservées impressionnent encore aujourd’hui. Il est particulièrement étonnant que même les chartreux – dont l’ordre prônait les règles les plus strictes en matière de vie ascétique avec un large devoir de discrétion – aient commandé des œuvres d’art magnifiques et de grande qualité pour louer Dieu.

Matthäus Merian l'Ancien (1593-1650), vue de la chartreuse de Mayence avec vue sur la forteresse de Gustavsburg, gravure sur cuivre in : Topographia Hassiae, Francfort 1646, Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum Mainz (Photo : Marcel Schawe)
Matthäus Merian l'Ancien (1593-1650), vue de la chartreuse de Mayence avec vue sur la forteresse de Gustavsburg, gravure sur cuivre in : Topographia Hassiae, Francfort 1646, Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum Mainz. Photo : Marcel Schawe)
Saint Bruno, bois avec peinture renouvelée, Mayence, probablement 3e quart du 18e siècle, Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum Mainz (photo : Marcel Schawe)
Saint Bruno, bois avec peinture renouvelée, Mayence, probablement 3e quart du 18e siècle, Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum Mainz. Photo : Marcel Schawe)
Caryatide des stalles de la chartreuse de Mayence, 1723/26, cathédrale de Trèves, chœur ouest (photo : Rita Heyen)
Caryatide des stalles de la chartreuse de Mayence, 1723/26, cathédrale de Trèves, chœur ouest. Photo : Rita Heyen)
Georg Joseph Melbert (1717-1786), La guérison du malade à l'étang de Bathesda, tableau provenant du cloître de la chartreuse de Mayence, vers 1750/53, Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum Mainz. Photo : Marcel Schawe)
Georg Joseph Melbert (1717-1786), La guérison du malade à l'étang de Bathesda, tableau provenant du cloître de la chartreuse de Mayence, vers 1750/53, Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum Mainz.Foto : Marcel Schawe)

Saint Bruno se tient prêt au début de l'exposition pour guider les visiteurs.

En 1084, Bruno a quitté Cologne pour s’installer près de Grenoble, où il a fondé un ermitage avec six personnes partageant ses idées. Chacun vivait dans sa propre cellule, se consacrant à la prière, à l’étude et au travail des mains. Ils ne se réunissaient que trois fois par jour pour la prière des heures. Saint Bruno avec son livre et sa tête de mort – probablement une statue en grès de Mayence datant de l’apogée de la chartreuse dans la deuxième moitié du 18e siècle – se tient prêt au début de l’exposition pour guider les visiteurs. Très vite, des nonnes ont également vécu selon les règles strictes des chartreux. Reconnues par le pape en 1170, les chartreuses se sont répandues dans toute l’Europe : Avec le premier âge d’or au 14ème siècle, non plus seulement dans l’isolement, mais aussi dans des villes comme Cologne (1334), Londres (1370) ou Nuremberg (1380). Que ce soit à cause de guerres dévastatrices, de la Réforme, ou de la Révolution française, les chartreux n’ont pas non plus été épargnés par la dévastation et la disparition. Il est étonnant que la seule chartreuse d’Allemagne encore existante, la chartreuse de Marienau près de Bad Wurzach, n’ait été fondée qu’en 1964 !

Georg Joseph Melbert (1717-1786), La Tentation de Jésus, tableau provenant du cloître de la chartreuse de Mayence, vers 1750/53, Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum Mainz (photo : Marcel Schawe)
Georg Joseph Melbert (1717-1786), La Tentation de Jésus, tableau provenant du cloître de la chartreuse de Mayence, vers 1750/53, Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum Mainz. Photo : Marcel Schawe)
Franz Ignaz Berdolt (vers 1669-1762), Calice du trésor de la chartreuse de Mayence, argent doré et pierres précieuses, Augsbourg, vers 1715/16, église paroissiale Saint-Nicolas, Kalteneber (Heilbad Heiligenstadt/Eichsfeld) (photo : Hildegard Lütkenhaus)
Anton Woensam (avant 1500-1541), Saint Bruno, gravure sur bois, vers 1516, Bischöfliches Dom- und Diözesanmuseum Mainz. Photo Musée épiscopal de la cathédrale et du diocèse de Mayence
Franz Ignaz Berdolt (vers 1669-1762), Calice du trésor de la chartreuse de Mayence, argent doré et pierres précieuses, Augsbourg, vers 1715/16, église paroissiale Saint-Nicolas, Kalteneber (Heilbad Heiligenstadt/Eichsfeld) (photo : Hildegard Lütkenhaus)
Franz Ignaz Berdolt (vers 1669-1762), Calice du trésor de la chartreuse de Mayence, argent doré et pierres précieuses, Augsbourg, vers 1715/16, église paroissiale Saint-Nicolas, Kalteneber (Heilbad Heiligenstadt/Eichsfeld). Photo : Hildegard Lütkenhaus
Manuscrit collectif théologique de la bibliothèque de la chartreuse de Mayence, Heidelberg et Mayence, du milieu du XIVe siècle au milieu du XVe siècle, Wissenschaftliche Stadtbibliothek Mainz (photo : Marcel Schawe)
Manuscrit collectif théologique de la bibliothèque de la chartreuse de Mayence, Heidelberg et Mayence, du milieu du XIVe siècle au milieu du XVe siècle, Wissenschaftliche Stadtbibliothek Mainz. Photo : Marcel Schawe)

Les stalles du chœur, dues au hambourgeois Johann Justus Schacht et à 21 compagnons menuisiers, sont célèbres dans le monde entier.

La chartreuse de Mayence remonte à l’archevêque Peter von Aspelt, qui donna aux moines un emplacement pour construire un monastère dans le Rheingau. L’original de cet acte de donation, un manuscrit sur parchemin daté du 21 mai 1320, est exposé à côté de l’accord du chapitre de la cathédrale pour le transfert du monastère à Mayence. De nombreuses reproductions illustrent le magnifique art du livre de cette époque. Les prières pour le salut de l’âme des fondateurs constituaient alors un modèle commercial lucratif pour les monastères. En 1323 – année de commémoration de l’exposition actuelle – les chartreux s’installèrent aux portes de la ville, en 1326 la chartreuse de Mayence fut reconnue comme membre de l’ordre, en 1360 son église conventuelle fut consacrée. De nombreuses fondations de filles suivirent. L’incendie du couvent en 1552 mit fin à cette première période de prospérité. Des vues avec la chartreuse de Mayence de Matthäus Merian ou de Franz von Kesselstatt montrent la situation historique. Une reproduction de la chartreuse de La Valsainte datant du début du 20e siècle permet de comprendre comment il faut se représenter les cellules des chartreux : une literie étroite, une niche de prière individuelle. Le contraste entre cette forme de vie privée et spartiate et les somptueuses salles d’église de la chartreuse de Mayence, qui s’est épanouie dans une splendeur baroque à la gloire de Dieu sous le prieur Michael Welcken dans la première moitié du XVIIIe siècle, ne pourrait être plus grand. Les stalles du chœur, que l’on doit au hambourgeois Johann Justus Schacht et à 21 compagnons menuisiers, sont célèbres dans le monde entier. Les armoires en noyer, vers 1723/26, précieusement décorées avec des bois précieux, de l’os, de l’étain, des cadres et des dorures, sont prêtées par le musée de la cathédrale de Trèves et peuvent être admirées comme des chefs-d’œuvre de l’artisanat d’art. Pour les autels en marbre et albâtre de Maximilian von Welsch de 1714, tout aussi célèbres, il faut se contenter de reproductions, tout comme pour les autels réalisés vers 1741/42 en collaboration par l’ébéniste Franz Anton Hermann et le sculpteur Burkhard Zamels. Mais les reproductions parfaites donnent une impression vivante du décor exceptionnel.


De l'imposant trésor de l'église d'autrefois, il ne reste que deux objets : un calice et un ostensoir provenant d'Augsbourg, la métropole de l'orfèvrerie de l'époque.

De l’ancien trésor de l’église, dont l’inventaire original comportait 96 numéros, sont exposés les deux seuls objets conservés, un calice et un ostensoir provenant d’Augsbourg, la métropole de l’orfèvrerie de l’époque. Franz Ignaz Berdolt est le créateur de ces objets prêtés vers 1716, en argent doré, ornés de pierres précieuses et d’émail. Les plus de 90 préciosités ont été vendues en 1781, comme tant d’autres trésors du monastère. Les chartreux, qui vivaient dans un isolement total, n’avaient pas de postulateur à Rome qui puisse intervenir auprès du pape pour la béatification ou la canonisation d’un membre de l’ordre. Même Bruno n’a pas été officiellement canonisé par Rome, mais sa vénération a été reconnue en 1622 pour toute l’Eglise catholique. Le fait que des moines chartreux aient été persécutés ou tués en raison de leur foi est attesté par un tableau monumental datant du milieu du XVIIe siècle et représentant une scène dramatique de martyre des chartreux à Londres. Les Chartreux étaient considérés comme l’ordre médiéval du livre par excellence. Il n’est donc pas étonnant que la copie de manuscrits ait joué un rôle important dans la stricte loi du silence. Parmi les originaux, le premier catalogue de la bibliothèque de la chartreuse, rédigé sur parchemin à Mayence en 1466/70, mérite une attention particulière. Comme les travaux manuels faisaient partie des attributions des chartreux, on trouvait parmi eux des relieurs, des horlogers, des menuisiers ou des peintres.


Sœur Johanna a restauré pour le musée épiscopal de la cathédrale et du diocèse de Mayence le tableau "Lasset die Kindlein zu mir kommen" (Laissez venir à moi les petits enfants) de l'atelier de Lucas Cranach l'Ancien.

Il convient de mentionner en passant que Sœur Johanna a également restauré pour le musée le tableau “Lasset die Kindlein zu mir kommen” (Laissez venir à moi les petits enfants) de l’atelier de Lucas Cranach l’Ancien, connu en plusieurs versions, ainsi qu’une “Sainte Barbe” de Joseph Ignaz Appiani à l’huile sur toile, vers1758, ou un maître-autel en plusieurs parties des XVIIe et XVIIIe siècles provenant de Sankt Emmeran à Mayence. Parmi les sculptures en bois qu’elle a restaurées, on trouve une “croix de la peste” du 14e siècle, quatre figures d’un autel en châsse vers 1519, un propitiatoire vers 1470/80 ou la “Pietà d’Appenheim” vers 1350. Elle est également très familière avec la restauration d’œuvres en pierre : elle a ainsi travaillé en coopération avec l’atelier de restauration Matthias Steyer (Dipl.Rest ; Niedernhausen) le groupe de crucifixion à six figures de grand format du cimetière St. Ignaz de Mayence ou la figure de voûte du milieu du 14ème siècle de St. En outre, elle a restauré le maître-autel baroque de “son” monastère d’Engelthal, ainsi que d’autres travaux pour des monastères aussi célèbres que Maria Laach ou Münsterschwarzach et des clients privés.

Lisez la suite dans RESTAURO 1/2024 – le numéro spécial consacré à l’Art Handling.

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