La commission consultative, chargée d’arbitrer les conflits relatifs à la restitution d’œuvres d’art confisquées pour cause de persécution nazie, fait l’objet de critiques depuis un certain temps. Ses membres ont été informés de sa dissolution lors d’une réunion à la chancellerie fin mai. Elle sera remplacée par un tribunal d’arbitrage.
La ministre d'État à la Culture Claudia Roth.
Photo : J. Konrad Schmidt
La “Commission consultative en matière de restitution de biens culturels spoliés par les persécutions nazies, en particulier ceux appartenant à des Juifs”, également connue sous le nom de Commission Limbach, a été créée en 2003. Elle devait servir de médiateur en cas de conflits entre les héritiers de collectionneurs juifs et les musées allemands concernant la restitution de biens spoliés en raison des persécutions nazies et contribuer à des “solutions justes et équitables” au sens de la Déclaration de Washington de 1998. Au cours de ses 20 années d’existence, la commission a été appelée 24 fois à émettre des recommandations qui ne sont pas juridiquement contraignantes. Le fait que la Commission ait été si peu sollicitée s’explique peut-être aussi par le fait qu’elle ne peut être saisie que par consentement mutuel. Ce fait a d’ailleurs souvent suscité le mécontentement des héritiers. Tout le monde devrait connaître le cas du tableau “Madame Soler”, peint par Pablo Picasso en 1903. Le tableau est en possession de la Bayerische Staatsgemäldesammlung et le Land de Bavière refuse de faire appel à la commission consultative dans le litige qui l’oppose aux descendants après la famille de banquiers Mendelssohn. Ce cas montre comment les choses ne devraient pas se passer et a également été fortement critiqué lors d’une conférence internationale à Washington et lors d’une audition de la commission culturelle du Bundestag.
Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue que de nombreux musées et héritiers ont réussi à se mettre d’accord sans l’intervention de la commission consultative et que de nombreuses restitutions se déroulent sans bruit dans le sens d’une “solution juste et équitable”. D’autres critiques concernant le travail de la commission étaient qu’elle travaillait trop lentement et que les décisions n’étaient pas transparentes. En 2016, la Commission a saisi l’occasion pour remanier son règlement de procédure. Dès le mois de mars de cette année, la décision de dissoudre la commission a été prise lors du 20e entretien au sommet sur la politique culturelle. Fin mai, Claudia Roth a invité les membres de la commission à un entretien à la Chancellerie fédérale pour leur annoncer que la dissolution était désormais effective. A l’origine, les partis de la coalition FDP, Verts et SPD avaient encore convenu d’une réforme de cet organe dans le contrat de coalition 2021. La suite des événements après la fin de la commission consultative doit être élaborée d’ici début octobre dans un concept correspondant et être décidée le plus rapidement possible par la Fédération, les Länder et les communes.
Des avis partagés sur une loi de restitution
Selon les médias, l’un des membres de la commission invités a eu l’impression d’assister à une farce lors de l’entretien avec Roth. On aurait encore pu émettre des objections contre la fin de la commission consultative et on aurait même été prié de poursuivre son travail. Mais la décision de dissolution n’a pas été abandonnée. Le renforcement de la commission consultative, initialement prévu et convenu par les Verts, le FDP et le SPD, est donc annulé. Et ce, bien que la ministre de la Culture Claudia Roth ait déclaré, selon les médias, que l’on voulait éviter que les descendants des personnes spoliées par les nationaux-socialistes ne soient obligés de se présenter comme des quémandeurs. Il était prévu que la commission soit en mesure d’initier des procédures de manière autonome afin d’éviter des cas comme celui de la Bavière avec le tableau de Picasso “Madame Soler”. Au lieu de franchir cette étape de la réforme, Claudia Roth, les représentants des Länder et des associations communales ont décidé dès le mois de mars de “remplacer la Commission par une juridiction arbitrale”. Hans-Jürgen Papier, qui préside la commission consultative depuis 2017, avertit depuis longtemps que l’Allemagne ne respecte pas suffisamment son engagement envers l’accord de Washington. Cela serait également dû au fait que la commission est trop faible dans sa forme actuelle. Mais une suppression de cet organe n’était certainement pas dans ses intentions. D’autant plus que, selon les médias, il donne à penser que les tribunaux d’arbitrage ne sont guère concevables sans un double consentement et que l’on ne peut donc pas tenir une promesse de saisine unilatérale. En tant qu’ancien président de la Cour constitutionnelle fédérale, il sait de quoi il parle. Selon les médias, il a également fait remarquer qu’une telle institution devait encore être mise en place. Pour cela, il faudra mettre à disposition des ressources humaines et financières. Tant que cela n’est pas fait, les procédures doivent être suspendues. Il a estimé que la commission devrait passer du statut de conseiller à celui de décideur, comme l’a appris la Deutschlandfunk. Une fois de plus, des représentants de la Jewish Claims Conference, entre autres, réclament une loi de restitution, comme on a pu le lire dans le Jüdische Allgemeine. Le ministre bavarois de la Culture Markus Blume plaide lui aussi pour une telle loi et a lancé une initiative du Bundesrat dans ce sens. Lors d’une audition de la commission de la culture et des médias en mars, l’écho d’une telle loi était toutefois partagé. Il faut toutefois se souvenir qu’à l’époque, on travaillait encore sur la base d’une réforme de la commission consultative. La décision de dissoudre la commission a été prise de manière tout à fait surprenante deux jours après l’audition en commission. Il reste maintenant à voir comment le gouvernement fédéral entend régler à l’avenir les restitutions d’œuvres d’art et de biens culturels spoliés pour cause de persécution nazie. Tous les participants s’accordent cependant à dire qu’une réglementation est nécessaire, en particulier en Allemagne, d’autant plus que l’on s’est engagé à respecter les principes de Washington.